Est en situation de précarité énergétique une personne qui éprouve dans son logement des difficultés particulières à disposer de la fourniture d’énergie nécessaire à la satisfaction de ses besoins élémentaires en raison de l’inadaptation de ses ressources ou de ses conditions d’habitat
La précarité énergétique est tout d’abord à lier à la question du niveau de vie. Selon l’Observatoire des inégalités en 2021, le niveau de vie médian en France est de 1 771 euros par mois, pour une personne seule après impôts et prestations sociales3.
La population en dessous de ce niveau de vie médian éprouve davantage de difficultés à régler ses factures d’énergie. Les dépenses énergétiques correspondantes représentent en effet, à consommation égale, une part plus importante de leur budget que la population au dessus du niveau de vie médian.
Le risque de précarité énergétique s’accroît logiquement auprès des personnes en dessous du seuil de pauvreté. Toujours selon l’Observatoire des inégalités, est considérée comme pauvre une personne qui vit avec la moitié du niveau de vie médian, soit 885 € par mois. C’était le cas de 5,3 millions de personnes en 2018 selon l’Insee.
L’incapacité de certains ménages à subvenir à leurs besoins énergétiques est directement lié à l’évolution des prix de l’énergie. Par exemple entre 2012 et 2021, le prix de l’électricité a par exemple augmenté de 40 % et celui du gaz de 13 %.
Cette situation s’est clairement aggravée depuis le début de la crise de l’énergie. Alors que le mégawattheure d’électricité pour l’hiver s’échangeait sur les marchés à 90 € fin août 2021, il est passé à 1 600 € sur la même période en 2022. Cette crise de l’énergie est mondiale et sans précédent. C’est pourquoi le Gouvernement a mis en place en septembre 2021 un « bouclier tarifaire » pour protéger les Français de la hausse des tarifs de l’énergie, au moyen d’une enveloppe de 20 milliards d’euros. Retrouvez ces chiffres et plus d’informations dans notre article consacré à la crise de l’énergie.
Au 1er janvier 2022, 5,2 millions de résidences principales seraient des « passoires énergétiques » soit 17,3 % du parc concerné. C’est-à-dire qu’elles correspondent aux étiquettes F ou G de la nouvelle mouture du diagnostic de performance énergétique (DPE) de 20214.
À noter que si l’on prend en compte les résidences secondaires et les logements vacants, plus enclins à présenter de mauvaises performances énergétiques, le nombre de passoires énergétiques s’élève à 7,2 millions de logements sur l’ensemble du parc résidentiel. 500 000 logements seraient même très énergivores avec une consommation annuelle d’énergie finale supérieure à 450 KWh /m²/an.
Plusieurs facteurs peuvent expliquer les différences de performance énergétique d’un logement à l’autre :
En situation de précarité énergétique, certains ménages en viennent à se priver matériellement et décident de ne pas maintenir leur logement à bonne température. Notons d’ailleurs que 20 % des Français déclarent avoir souffert du froid pendant au moins 24 h lors de l’hiver 2020-2021.
À l’inverse, la précarité énergétique concerne aussi l’inconfort d’été. En 2020, 52 % des ménages déclarent avoir souffert du chaud pendant au moins 24 h. Que ce soit à cause de la canicule ou du manque d’isolation et d’une ventilation performante5.
Plus grave, la précarité énergétique peut engendre des conséquences sur la santé des occupants d’un logement :
Pourquoi la précarité énergétique accentue les inégalités sociales ?
Parce que les inégalités de revenus se sont accentuées ces dernières années, les inégalités en termes d’effort énergétique se sont accrues également. Ainsi la part du budget consacrée à l’énergie est d’autant plus élevé que le revenu est faible. Dit autrement, les ménages modestes dépensent plus pour l’énergie en proportion de leur revenu ; tandis que les ménages plus aisés dépensent proportionnellement moins de leur revenu dans le poste énergie.6
Comment la précarité énergétique peut participer au processus d’exclusion ?
La précarité énergétique peut entraîner un isolement social des foyers concernés. L’inconfort d’un logement (par exemple à cause d’une température trop basse) ou son insalubrité (par exemple à cause des moisissures) peut générer un sentiment de honte tel que le ménage se refuse à inviter des personnes extérieures. Cet exemple montre comment la précarité énergétique peut provoquer le repli des occupants du logement sur eux-mêmes. Elle peut également favoriser le retard scolaire ; les enfants en situation de précarité énergétique étant plus souvent malades.
L’Observatoire national de la précarité énergétique a défini 3 indicateurs permettant le suivi de ce phénomène.
Cet indicateur, émis par le Ministère de la Transition énergétique, correspond à la part des dépenses énergétiques d’un logement sur le revenu disponible du ménage. Si un foyer présente un taux d’effort énergétique supérieur à 8 %, on considère qu’il est en situation de précarité énergétique. Ainsi en 2020, c’est 10,5 % des ménages qui étaient en situation de précarité énergétique, soit 3 millions.
Notons que pour assurer un suivi au plus juste de ces mesures, un indicateur corrigé de la météo est appliqué, afin neutraliser l’effet de la météo d’une année à l’autre sur les consommations. Avec l’indicateur corrigé de la météo, et considérant la douceur de l’hiver 2019-2020, c’est en fait 11,7 % des ménages qui sont en situation de précarité énergétique !
Fourni par le baromètre énergie-info du médiateur national de l’énergie, cet indicateur permet d’identifier les ménages qui déclarent avoir souffert du froid dans leur logement au cours de l’hiver précédent pendant au moins 24 heures. Ils sont alors considérés en situation de précarité énergétique.
Nous l’avons vu précédemment, 20 % des ménages sont concernés par cet indicateur pour l’hiver 2020-2021. Parmi eux, 40 % pointent d’une doigt une mauvaise isolation thermique et 36 % évoquent une privation pour des raisons financières.
Cet indicateur est un autre moyen d’identifier les ménages en précarité énergétique. Il met en évidence les foyers pour lesquels les revenus sont inférieurs au seuil de pauvreté (885 € par mois) et les dépenses en énergie sont supérieures à la médiane nationale.
Des initiatives gouvernementales existent pour prévenir et lutter contre la précarité énergétique. De plus, des organismes et des associations œuvrent au quotidien pour sensibiliser et agir face à ce phénomène.
Créée en 2021, la Journée contre la précarité énergétique vise à sensibiliser le grand public et les décideurs à propos de ce phénomène. Elle valorise les actions publiques et associatives de prévention et de lutte sur tout le territoire. Enfin, elle tend à fédérer les différents acteurs de la précarité énergétique. En 2022, la seconde édition a eu lieu le 24 novembre.
Cet organisme, créé en 2011, est une réponse à la loi Grenelle 2 du 12 juillet 2010. L’Observatoire National de la Précarité Énergétique (ONPE) fait référence dans le domaine. Ses missions sont les suivantes :
L’ONPE fournit des clés d’aide à la décision aux services et aux agences de l’État, ainsi qu’aux collectivités territoriales, aux fournisseurs d’énergie, aux associations et aux professionnels du secteur.
Le « bouclier tarifaire »
Annoncé en septembre 2021, le bouclier tarifaire vise à protéger les Français de la hausse des tarifs de l’énergie. Une enveloppe totale de 20 milliards d’euros a permis :
Le Plan de résilience économique et sociale
En réaction aux conséquences économiques de la guerre en Ukraine, définit en mars 2022 un Plan de résilience économique et sociale, comprenant les mesures suivantes :
Le Plan sobriété énergétique
Annoncé en juin 2022, ce plan sobriété énergétique entend répondre aux objectifs de réduction de 40 % de la consommation énergétique d’ici 2050 et 10 % entre 2019 et 2024. Une somme de 4,8 milliards d’euros est avancée pour réaliser les mesures suivantes :
Créé en 1990, le Fonds de Solidarité Logement (FSL) aide les ménages les plus modestes à payer leurs factures d’énergie, d’eau et de téléphone. Ses modalités ne sont pas définies au niveau national mais au niveau des territoires. Le financement du FSL est assuré par différents acteurs tels que la CAF, l’État, les bailleurs sociaux ou encore les fournisseurs d’énergie. En 2021, on dénombre plus de 56 000 bénéficiaires, pour une aide moyenne de 337 €.
Mis en place 2018 en remplacement des tarifs sociaux, ce dispositif aide les ménages à revenus modestes à payer leurs factures énergétiques et à financer certains travaux de rénovation énergétique. Il est attribué aux foyers dont le logement est imposable à la taxe d’habitation et dont le revenu fiscal de référence annuel est inférieur à 10 800 € pour une personne seule.
D’une valeur moyenne de 148 € par foyer, le Chèque énergie a été remis à 5,8 millions de ménages en 2021. Comme vu précédemment, un chèque complémentaire de 100 € à été envoyé à l’ensemble des bénéficiaires en décembre 2021. Selon le Commissariat général au développement durable (CGDD), 57 % des bénéficiaires du Chèque énergie seraient en situation de précarité énergétique.
L’Observatoire National de la Précarité Énergétique tient à jour sur son site une liste exhaustive des aides financières à même de prévenir ou de lutter contre ce phénomène. (source 7)
L’ONPE distingue les aides dédiées au règlement des factures énergétiques et celles dédiées à la rénovation et la performance énergétique. Peuvent également être identifiés les dispositifs à l’attention des propriétaires occupants, des propriétaires bailleurs, des locataires ou des syndicats de copropriété.
Outre le Chèque énergie et le FSL déjà évoqués, voici quelques unes des aides disponibles7 :